Trek : La Traversée de la Palestine du 13 au 20 Novembre
Plus qu’un trek : une aventure humaine et culturelle
Nous étions finalement 16 participants dont 14 ganistes pour découvrir ce trek pas comme les autres en Palestine (voir le détail de l’itinéraire sur le site de https://phtrail.org/fr/home-france/). Ce trek , attendu depuis plus de deux ans, a été initialisé et organisé par Le comité FSGT de l’Isére. L’accompagnement sur place a été assuré par un guide français (Jean-lou) particulièrement impliqué sur la genèse du projet « grande Traversée de la Palestine » et d’un accompagnateur palestinien anglophone (Nidal). Notre parcours s’est entièrement déroulé en Cisjordanie.
Jour1 : vol Lyon-St Exupéry/Tel-Aviv et liaison en Bus pour Bethléem / Beit sahour, visite d’une distillerie de bière artisanale, puis nuit en pension de famille à el Beit a Beit Sahour (3km de Bethléem).
Point historique et géopolitique de la région :
Déjà, entre 1917 et 1947, dans la période du mandat britannique, les territoires palestiniens étaient convoités par les Juifs venant en nombre de l’Europe de l’Est. Cette période est déjà marquée de violentes révoltes alimentées par les deux parties. En 1948, sous l’égide l’ONU, le partage de la Palestine en deux états indépendants est acté : l’un arabe l’autre juif. À partir de là, L’état juif indépendant est créé sous le nom d’Israël. Il prend le contrôle de 77 % des territoires palestiniens sous mandat, notamment la majeure partie de Jérusalem. Plus de 700 000 palestiniens fuient ou sont expulsés de leurs villages. Il doivent s’installer dans des camps de réfugiés en Cisjordanie, Liban, Jordanie ou Syrie.
La guerre des Six jours entre 1967 et 1973 voit Israël s’emparer un peu plus des territoires palestiniens de la Cisjordanie et le la bande Gaza : la quasi totalité de la Palestine est occupée par l’état Juif. La première Intifada en 1987(révolte des pierres ) menée par le peuple palestinien montre l’émergence d’une résistance pacifique.
Les accords d’Oslo en 1993 signés entre l’OLP de Yasser Arafat et Israël ne tiendront pas, plus de 2 ans. L’assassinat d’Yitzhak Rabin en 1995, par un extrémiste religieux juif, sonnera la fin de cet accord de paix. Depuis, le grignotage des terres palestiniennes ne cesse de croître avec l’extension des colonies israéliennes : 164 colonies et 116 avant-postes sont dénombrés en Cisjordanie. Ces colonies sont reconnaissables avec leurs barbelés qui surmontent les murs d’enceinte et les soldats israéliens qui les protègent.
Le processus d’extension des colonies est permanent et pervers : installation d’un, puis deux, puis trois bungalows occupés par des juifs intégristes sur une butte de terre, puis des barbelés puis des maisons, puis l’armée israélienne qui garde le lieu… Ainsi l’extension des colonies représente depuis longtemps un obstacle majeur à la paix entre Israël et les Palestiniens.
Jour 2 : BETHLEEM – BATTIR – BETHLEEM
La matinée est consacrée à une courte randonnée dans une vallée peuplée d’oliviers nous menant de Beit Jalla à Battir, village classé patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2014. Déjeuner sur place.
Retour à Bethléem en bus pour le déjeuner au restaurant ; l’après-midi est consacré à la visite du camp de réfugiés d’Aida. Rencontre et échange avec le directeur du centre culturel du camp d’Aida qui prône la résistance par la culture et le théâtre, puis découverte du mur de séparation ainsi que des œuvres de Street Art de Banksy sur le mur.
En fin d’après-midi, balade dans la vieille ville de Bethléem, visite de église de la Nativité et incursion sur la terrasse d’un artisan pour découvrir la vieille ville et la mosquée vue d’en haut de nuit. Dîner et 2ème nuit à la pension El beit à Beit sahour.
Retour sur les camps de réfugiés palestiniens
Aujourd’hui 19 camps de réfugiés palestiniens existent en Cisjordanie et ce depuis 1948. Bien sûr la vie s’y est organisée et améliorée : passage d’abri sous tente aux maisons en dur, organisation de la vie sociale, création d’écoles de dispensaires…. Le droit au retour dans leur village d’origine était inscrit dans l’accord de 1948, mais aujourd’hui après la 4éme génération et la réalité géo-politique ce droit devient illusoire. Une clé symbolisant le droit au retour demeure toujours présente à l’entrée de chaque camp.
De nombreuses ONG, humanitaires, culturelles, religieuses interviennent pour améliorer la vie quotidienne de ces réfugiés. Mais la restriction des libertés est toujours présente avec les murs d’enceinte et les interdictions de se déplacer hors de la ville.
Jour 3 : Canyon du Wadi Qelt / Jéricho : Randonnée de 8 km
Une courte navette en bus nous amène au départ de la rando. Nous descendons puis traversons le canyon à sec de Wadi Qelt pour visiter le monastère orthodoxe de St Georges (étrange et spectaculaire monastère accroché au flanc de la montagne et toujours occupé par des moines orthodoxes), puis longue et belle descente du canyon par un sentier en balcon jusqu’à rejoindre Jéricho.
Montée en téléphérique jusqu’au mont des tentations (c’est ici que Jésus aurait été tenté pendant 40 jours par Satan…. selon les croyances chrétiennes). Pique-nique en terrasse dominant la riche et verdoyante vallée de Jéricho et visite du monastère gréco-orthodoxe construit à flanc de montagne.
Court transfert vers la mer Morte pour un bain insolite dans la mer à -460m et avec un taux de salinité 10 fois supérieur à celui de nos océans.
Dîner et nuit en pension située dans un « Women center », association valorisant l’inclusion des femmes dans la société et l’économie palestinienne, au camp d’Aqabat Jaber, situé en périphérie de Jéricho. Très bon accueil et belle rencontre avec les femmes bénévoles qui tiennent et gèrent ce centre d’accueil.
Point sur le découpage administratif de la Cisjordanie.
Depuis septembre 1995 un accord intérimaire prévoit un découpage très particulier des territoires occupés de Cisjordanie :
- Zone A : qui couvre 20 % du territoire de la Cisjordanie où il incombe à l’autorité palestinienne d’assurer la sécurité et l’administration. Cette zone couvre essentiellement 7 grandes villes.
- Zone B : elle couvre 27 % du territoire. Cette zone est gérée administrativement par l’autorité palestinienne et la sécurité via la police est assurée par Israël.
- Zone C : soit 62 % des terres de Cisjordanie. L’administration et la police sont assurées exclusivement par Israël.
En conclusion la prise de contrôle par l’état Israélien sur les territoires palestiniens devient de plus en plus pressante, c’est ainsi que la liberté de déplacement des palestiniens est de plus en plus remise en question et difficile.
Jour 4 : Nabi Musa/ Mar Saba / Tel Al Qmar
La plus longue et belle randonnée : environ 17 kms.
Départ de la randonnée à proximité du Village de Nabi Musa. Belle traversée montante facile du désert de Judée. Partis d’environ 200m sous le niveau de la mer, nous montons jusque sur un plateau aride qui domine rapidement un magnifique canyon. Surprise : au fond de ce beau canyon un torrent s’écoule : il s’agit de l’ensemble des eaux usées de Jérusalem et de ses faubourgs qui sont rejetées vers le désert de Judée puis la mer Morte.
Et enfin nous découvrons le surprenant et immense Monastère de Mar Saba, perché à flanc de la falaise et parfaitement intégré au paysage. Interdit aux femmes; il est actuellement fermé aux visites et environ 15 moines séjournent actuellement dans cet immense monastère.
Pique nique très agréable sous les oliviers à l’entrée du monastère.
Puis poursuite de la randonnée vers un petit sommet avant de redescendre vers un oued et remonter vers notre premier camp bédouin. Ce camp installé sur un monticule ouvre sur un beau point de vue. Mais le véritable camp de nos hôtes est installé à plus de 500m avec leurs troupeaux de chèvres et de moutons. Nos repas préparés par les femmes du camp Bédouin seront livrés en 4*4. Échange en soirée avec le responsable du camp bédouin sur sa vie entre l’accueil des touristes et la pression israélienne des colonies.
Les problèmes de l’eau en Palestine :
L’utilisation de la ressource en eau est le symbole fort de la situation de dépendance des Palestiniens vis à vis des Israéliens. Cette situation existe depuis très longtemps ; dès le début, la ressource en eau était déjà accaparée. Les Israéliens et les Palestiniens se partagent les deux sources principales d’eau: l’aquifère de montagne et le bord supérieur du Jourdain et ses affluents.
Les citoyens israéliens bénéficient d’un accès illimité à l’eau toute l’année tandis que des centaines de milliers de Palestiniens souffrent de pénuries d’eau pendant les mois les plus chauds de l’été. Plusieurs fois par semaine l’accès à l’eau est coupé pour les Palestiniens. Pour parer à cette situation, tous les immeubles des villes palestiniennes sont surmontés de nombreux grands bidons d’un m³ pour faire face aux coupures.
Cette situation est doublée de l’absence de réseau et de traitement des eaux usées qui vont polluer les Wadis et les nappes phréatiques .
Jour 5 : TEQUA / RASHAIDA : randonnée de 14 kms
Après une courte navette en minibus nous rejoignons le village de Tequa. De là nous entrons dans le Wadi Jihar. L’itinéraire facile se déroule presque exclusivement au fond de ce canyon à sec. Environ 200m au dessus de nos têtes, tout au long du parcours, de magnifiques grottes ou baumes nous surplombent.
À la sortie de canyon, nous sommes repris par les 4×4 pour rejoindre, via une route, puis une piste, le campement bédouin de Abu Ismaël.
Bon accueil avec en prime le déjeuner dans la tente bédouine . L’après midi est libre entre rencontre et visite de notre camp avec les abris des brebis et des chèvres, et petite balade jusqu’à la prison jordanienne désaffectée, vestige historique de la présence jordanienne avant 1967, et abandonnée à 2 km du campement.
Repas traditionnel (poulet riz) cuit à l’étouffée sur les braises d’un four enterré puis échanges et discussions avec le patriarche Ismael, chef du campement bédouin qui nous relate son engagement pour l’accueil des touristes et randonneurs et la vie de toute la famille avec ses deux femmes, quinze enfants et trente et un petits enfants. Son campement bédouin devient permanent et sédentaire. Seuls les troupeaux de chèvres, ses moutons et ses dix chameaux nomadisent en toute liberté.
Point sur la situation des Bédouins de Palestine :
Aujourd’hui 20 000 Bédouins sont installés en Cisjordanie. Disséminés sur l’ensemble des districts, ils constituent la tranche de population la plus pauvre et la plus démunie de la Palestine occupée. Les campements, dans leur majorité, sont loin de l’idée romanesque que l’on peut se faire d’un peuple épris de liberté… Des amas de tôles, de bois récupéré, de bâches plastifiées et de toiles colorées forment les habitations branlantes de ces anciens nomades du désert ; des abris de fortune qu’on appellerait plus volontiers bidonvilles. Cette situation est à modérer dans les campements qui se sont tournés vers l’accueil touristique où le confort et l’hygiène se sont améliorés.
Depuis 1967, ce peuple vit la plus longue occupation militaire de l’histoire moderne. En effet les Bédouins sont soumis, au même titre que le reste de la Cisjordanie, aux même entraves aux libertés de déplacement et aux mêmes problèmes d’accès à l’eau potable avec les bidons d’eau en réserve sur les toits pour faire face aux coupures d’eaux intempestives. Aujourd’hui la vie des tribus s’est progressivement sédentarisée autour de leur cheptel composé de chèvres de chameaux et de brebis.
Jour 6 : RASHAIDA HEBRON/ JABEL EL BABA
Lever très matinal à 3h00 du matin pour découvrir, après deux heures de randonnée nocturne dans le désert, le lever de soleil sur la mer Morte. En effet, arrivés vers 5h15 du matin à 600m de dénivelé au dessus de la mer Morte, nous apprécions tous ce moment magique du soleil qui pointe derrière les montagnes jordaniennes, et nous découvrons l’abîme qui nous sépare de la mer Morte et ses ourlets de sel . Nous voulons tous prolonger ce moment et s’imprégner des belles lumières rasantes qui inondent le désert.
Vers 7 heures les 4×4 de notre hôte nous ramènent, via une piste chaotique et mouvementée, au campement bédouin pour le petit déjeuner.
À 9heures nous quittons nos hôtes bédouins avec beaucoup d’émotions pour rejoindre la ville d’Hébron. Cette ville est très marquée par l’histoire et le conflit israélo/palestinien. Après le contournement d’un checkpoint nous pouvons rejoindre la vieille ville.
Aujourd’hui vendredi : pour les musulmans c’est jour de congé et de prière donc beaucoup de boutiques sont fermées. Nous allons toutefois pouvoir rencontrer un souffleur de verre en pleine action dans son atelier. Puis après avoir passé le checkpoint nous pénétrons la zone gardée par les militaires israéliens.
L’ambiance change complément : c’est la veille de la fête de Shabbat : de très nombreux juifs pratiquants et exubérants arpentent la rue des Martyrs. Cette rue, baptisée comme par un fait exprès «Shouhada» (des Martyrs), porte d’un bout à l’autre les stigmates de l’occupation. L’ambiance est de plus en plus tendue et électrique quand nous voulons rejoindre le seul et dernier magasin palestinien de cette rue. Les soldats israéliens veulent filtrer notre entrée. Finalement nous pouvons enter dans le magasin. Le propriétaire, dernier résistant palestinien à refuser de partir de cette rue, nous explique son combat pacifiste. Et il nous accueille pour le déjeuner (c’était prévu).
HEBRON une histoire et un statut particulier :
Hébron est aujourd’hui la 2éme ville de Cisjordanie avec 160 000 habitants et la région la plus urbanisée. Elle compte en son centre une vieille ville historique. Ce cœur historique, privé de remparts, est constitué de bâtiments très serrés.
Le 25 février 1994, c’est Le massacre du tombeau des patriarches commis par Baruch Goldstein, un colon israélien extrémiste. Il tua 29 palestiniens de la ville d’Hébron et en blessa 125 autres, alors qu’ils étaient en train de prier un vendredi du mois sacré du ramadan. Depuis ce jour les Israéliens ne cessent de restreindre les libertés et le commerce dans la vieille ville ; c’est ainsi que de nombreux commerces ont été obligés de fermer leur porte.
La colonie juive installée en plein cœur de la vieille ville, composée de 400 Juifs intégristes, est protégée par plus de 2000 soldats de l’armée israélienne.
Notons le statut administratif particulier d’Hébron avec ses zones H1 et H2. la zone H1 contrôlée par l’autorité palestinienne et la zone H2 contrôlée par l’armée israélienne. Voilà comment Israël pratique la colonisation de l’intérieur.
Après cette immersion dans cette ville martyre d’Hébron, nous retrouvons notre bus pour rejoindre notre campement bédouin du jour à proximité de Jéruralem avec vue sur le mont des Oliviers. Le campement de Jabel Baba, propriété du Vatican a été cédé aux Bédouins, tout proche, pour développer un lieu d’accueil touristique. Ce site remarquable a une importance stratégique car il limite l’implantation des colonies israéliennes autour de Jérusalem, protégeant ainsi les Bédouins, menacés d’expulsion, et offre une belle vue sur Jérusalem et le désert.
J7 : Visite de Jérusalem Est
Petite navette de minibus pour arriver au pied du mont des Oliviers ; passage du checkpoint à pied sans problème, et rude montée au mont des Oliviers.
De là nous découvrons le point de vue sur la magnifique vieille ville fortifiée de Jérusalem Est. Il s’agit d’un immense carré d’un km de côté, fortifié et accessible par plusieurs portes.
À l’entrée, nous prenons contact avec notre guide francophone autorisée, qui nous accompagnera pour visiter le cœur de la vieille ville avec ses quartiers musulman, chrétien, juif et arménien.
A l’intérieur une vie étrange et cosmopolite : ce samedi matin à 10h… déjà de nombreux touristes et pèlerins de toutes religions. Jérusalem est la ville sainte des trois religions monothéistes dont le père est Abraham : ainsi se côtoient les Musulmans, les Chrétiens et les Juifs. Et de la même manière les lieux de culte : mosquées, églises et synagogues sont souvent très proches. Nous pouvons visiter l’église Saint Sépulcre, lieu sanctuarisé abritant le crucifix et la grotte où est mort Jésus et lieu de pèlerinage des Chrétiens.
Une courte incursion sur la terrasse de restaurant surélevée nous permet de dominer la vielle ville. Nous rejoignons après le passage du checkpoint, le Mur des Lamentations : lieu de culte emblématique des Juifs. Toute la journée nous déambulons dans cette ville riche d’un patrimoine religieux et de souks particulièrement animés. A noter la grande propreté de cette ville touristique. Retour à l’hôtel à 400m de la porte de Damas pour un bon dîner et une nuit réparatrice.
Jour 8 : visite de l’Esplanade des Mosquées à Jérusalem et retour
Dimanche, l’accès à l’esplanade des mosquées est possible et ouvert dès 7h00 du matin. Nous voici partis à 6h30 en visite libre ; après le passage du checkpoint nous rejoignons l’immense et très spectaculaire esplanade des mosquées. Cette immense esplanade entoure la très belle Mosquée Al-aqsa et son Dôme du Rocher.
La faible fréquentation matinale et les lumières du soleil levant donnent une dimension particulière à ce lieu emblématique de Jérusalem pour les musulmans, mais il concentre toutes les tensions et tous les dangers, immédiatement à coté du Mur des Lamentations.
Retour à l’hôtel pour un copieux petit déjeuner, puis liaison en bus vers Tel Aviv et retour à Lyon avec le plein d’émotions et d’images dans nos têtes.
Les 16 participants à cette belle aventure humaine:
Azzedine, Christiane G, Bernard F, Michèle F, Alain D, Jacky E, Chantal P, Daniel L, Dominique D, Catherine R, Michèle B, Claire G, Max F, Régine L du GAN et Eric et Jean Mathieu du Ski FSGT …
et notre accompagnateur : Jean-Lou